Liberté d’expression ne signifie pas systématiquement démocratie

Dans un système démocratique digne de ce nom, dans un système où le peuple a le pouvoir, le peuple ne ressemble pas à une masse de supporters ! Dans une véritable démocratie, le peuple n’est pas supporter passif de son pays mais citoyen acteur et décideur ! Il entre dans l’Agora pour jouer son rôle politique ! Jamais il n’est relégué au rang de simple spectateur dans les gradins ou derrière son écran de télévision, tel un supporter ne pouvant que huer ou applaudir le spectacle ! Dans une véritable démocratie, un citoyen ne se contente pas de choisir son représentant pour n’avoir ensuite que le droit de le blâmer s’il représente mal ses intérêts, non, il participe aux débats et légifère !

Lecteur, cesse de confondre le fait d’évoluer en démocratie et le fait de pouvoir se plaindre librement du chef. Il faut être naïf pour penser que jouir de quelques libertés et être épargné d’un régime dictatorial sanguinaire justifient que l’on évolue au sein d’une sincère et authentique démocratie. Contrairement à ce que beaucoup estiment, le concept-clef de la démocratie n’est pas la liberté mais le pouvoir, le choix. Et le véritable choix ne consiste pas à choisir celui qui choisira mais à choisir tout court ! La démocratie ne veut pas dire avoir le droit de crier, d’insulter ou de se moquer ouvertement du chef, mais d’être, avec les autres membres du peuple, le chef du pays !

Comprends-le, lecteur, ce n’est pas parce que dans ton pays, tu as le droit de hurler dans la rue contre le système ou d’écrire des pamphlets sur sa pseudo-démocratie, que tu as le pouvoir. C’est grave de ne pas comprendre cela, et tu veux savoir quelque chose ? L’heure est grave ! Les gens dorment, on les a endormis, on a brouillé les pistes pour qu’ils confondent le fait d’avoir le droit de se plaindre des hommes de pouvoir et de leurs choix avec le fait d’avoir le pouvoir. En y pensant bien, je ne sais pas ce qui est le plus grave : que le peuple n’ait aucun réel pouvoir ou qu’il ne s’en rende pas compte et soit même convaincu du contraire ? Peuple, je me dois de te le redire parce que c’est sérieux : tu confonds liberté d’expression et démocratie ! Tu n’évolues pas dans une franche dictature qui met en prison ouvertement ceux qui critiquent le pouvoir, et après ? Évolues-tu pour autant dans une franche démocratie ?

La recette n’est pas bien compliquée pour convaincre la personne « endormie » d’être en démocratie. Il suffit qu’elle puisse comparer des vidéos de concitoyens lançant des tartes à la crème à la tête d’un élu ou giflant un président de la République avec des documentaires sur l’emprisonnement immédiat des dissidents dans d’autres pays totalitaires, et le tour est joué : le somnambule croit que pouvoir ridiculiser ou critiquer le pouvoir en place est un critère suffisant pour se déclarer être en démocratie. Le sentiment de fierté de ne pas appartenir à un pays reconnu officiellement comme totalitaire efface chez les endormis tout besoin de questionnement sur leur propre pays. Souvent, on les entend rétorquer à ceux qui tentent de les informer qu’ils ne sont pas en démocratie : « C’est pire ailleurs ». Comme si cela suffisait à démontrer que la démocratie triomphe chez eux.