La question se pose de savoir si c’est parce que nous sommes en ploutocratie que nous ne votons pas les lois ou si c’est parce que nous ne votons pas les lois que nous sommes en ploutocratie. En d’autres termes, il est intéressant de se demander quelle est la cause et quelle est la conséquence dans l’histoire que nous vivons : l’élection de maîtres ou le pouvoir d’achat effréné des riches ? Ce qui est sûr, c’est qu’une fois cette histoire commencée, causes et conséquences s’entretiennent à merveille. J’ai cru un moment que le fait de se demander qui était la poule et qui était l'œuf était essentiel pour savoir qui combattre et comment regagner notre souveraineté. Mais en réalité, il y a plusieurs moyens d’action pour devenir souverain : soit prendre le pouvoir par la force populaire en expliquant qu’il est illégitimement placé aux mains d’une caste qui pille la souveraineté du peuple ; soit le prendre par l’urne en l’offrant à un parti qui aura ensuite le projet d’instaurer une réelle démocratie ; soit se concentrer massivement sur une seule mesure qui ferait avancer les choses en matière de démocratie, tel le RIC par exemple, jusqu’à gain de cause, et avancer ainsi de mesures en mesures ; soit faire tomber l’Empire qui génère ce système par le boycott des instituions qui le servent, par des actions de « désobéissance civile » ou bien par un boycott ciblant les multinationales aux mains des puissants dudit empire, bref, tout ce qui permet de prendre ses distances avec cet empire ploutocapitaliste est intéressant pour l’affaiblir. Cependant pour qu’une de ces mesures fonctionne, il faut que le peuple, comme un seul homme, la sélectionne et ait à cœur de la mener à bien, de manière déterminée. Pour cela, il faut qu’il soit uni et conscient de l’importance de sa mission. Et c’est là que les choses se compliquent car, pour être conscient que c’est ce qu’il doit faire, il doit faire ce qu’il ne fait jamais : méditer en profondeur sur les maux qu’il subit : chercher la « cause des causes ». Tant qu’il ne fera pas cela, il continuera de se plaindre de tous ses maux, et les maîtres, responsables de tous ses maux, se porteront bien. Autrement dit, tant que le peuple ne méditera pas sur la cause profonde de ses maux, il sera responsable de tous ses maux. Eh oui, aussi étonnant que cela puisse paraître, un peuple qui subit des lois injustes sans se pencher sur la cause profonde de celles-ci, n’en est pas seulement victime, il en est aussi complice.
En fait, plusieurs angles d’attaque sont envisageables pour rejoindre la démocratie mais je crois que pour mener à bien une telle entreprise, il faut avant tout que le peuple, comme un seul homme, comprenne que ce n'est pas « aux hommes de pouvoir d’écrire les règles du pouvoir[1] », qu'élire un représentant sans pouvoir le révoquer, c'est élire un maître. Bref, je crois qu’une telle entreprise ne pourra pas être menée à bien sans une prise de conscience collective, dépendant elle-même d’une multitude de prises de conscience individuelles, dépendant elles-mêmes d’un éveil du moi-pensant des citoyens.
[1]U Notre cause commune. Étienne Chouard